J.A. Baettig

J.A. Baettig

Ma plus belle histoire de vacances d'enfance

 

 

Arrivée 5e au concours 

 

Un grand MERCI  !!! à tous ceux et celles qui ont plébiscité mon histoire !!!

 

 

Milieu des années 80, quelque part au bord de la mer en Espagne. C'est l'été de mes 4 ans et c'est la première fois que je pars à la mer. Mes parents ont la jeune trentaine et c'est nos premières vacances en famille. Nous roulons toute la nuit, et entre deux sommeils, allongée sur la banquette arrière - d'un temps où les ceintures de sécurité n'étaient pas encore obligatoires - je vois défiler depuis en dessous, les lumières orangées des lampadaires qui jalonnent l'autoroute. C'est grâce à un ami de mes parents, qui leur a prêté son appartement en bord de mer, que ces vacances sont possibles. En effet, mon père est dessinateur en bâtiment et ma mère, mère au foyer. Le budget à la maison est donc des plus modeste.

 

Quand nous arrivons enfin dans la matinée - mes parents fatigués d'avoir roulé toute la nuit - c'est une scène d'apocalypse qui s'offre à nous. Lorsque nous pénétrons dans l'appartement, il semble qu'un holocauste nucléaire a récemment dévasté les lieux et que tous les habitants ont dû fuir précipitamment. La table n'a pas été débarrassée, des restes de nourriture y traînent encore, la salle de bain a été submergée par un tsunami et oh joie et merveille, un train marchandise passe toutes les heures dans la chambre à coucher.  Les lits à ressorts quant à eux sont tellement défoncés qu'ils ressemblent à des hamacs. Après plus de 12h de route il ne restait plus qu'une chose à faire, pleurer de rire. 

 

Très bricoleur, mon père a démonté les portes des chambres et les a glissées sous les matelas pour en faire des sommiers, pendant que ma mère redonnait un peu de fraîcheur aux lieux. En milieu d'après-midi nous avons enfin pu nous asseoir autour de la table pour manger quelque chose, avant d'aller pour la première fois, pour moi, voir la mer. C'est là que mon père, pour me faire encore un peu patienter, parce que je n'en pouvais plus d'attendre ce pourquoi nous avions fait tant de  route, a attrapé un carton et ma boîte de crayons de couleur.

 

Il s'est alors mis à dessiner les fruits, la carafe d'eau, la bouteille et le verre de vin qui étaient posés devant nous sur la table en bois. Sous mes yeux ébahis, toute une nature morte, en crayon de couleur, a soudain pris vie devant moi. Avec mes yeux de petite fille, je me souviens d'avoir été subjuguée par ce que mes crayons étaient capables de faire entre ses mains. Ce fut un moment de partage et de complicité, père - fille, très riche en émotion. 

 

Peu de temps après, la carrière de mon père a démarré, il s'est vu confié de gros projets et les heures de travail se sont allongées à l'infini. Il y a eu d'autres enfants, il y a eu d'autres vacances de plus haut standing, mais lorsque j'évoque un souvenir heureux de mes vacances d'enfance, c'est à cet instant que je pense. Dans un petit appartement ruiné d'Espagne, la simplicité et le bonheur d'un moment de partage entre un père et sa fille. Les années ont passé mais le dessin est resté. Il a vécu 5 déménagements, traversé l'Atlantique et aujourd'hui, dans un coin de ma cuisine, il me semble toujours aussi vivant et lumineux que ce souvenir d'il y a bientôt 30 ans.



05/10/2015
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